Aujourd'hui, ce 10 decembre 2009 c'est l'anniversaire du deces de Mali Herzberg d'apres la date hebraique (le yurtzeit). La date du calendrier classique est le 14 decembre. Quatre jours pour se souvenir, pour completer les 361 autres de l'annee ou ceux qui l'ont connu et aime pensent tres fort a celles qui les eclairait de sa presence.
En ce 10 decembre 2009 je suis a Vienne, en Autriche avec ma famille. Ma femme Debbie est en voyage au Liberia pour son travail. Comme le mien, c'est un travail qui essaie, meme si la cible n'est pas toujours atteinte (ou disons, pas atteinte en ligne toujours droite), d'ameliorer la condition du monde dans lequel vivent les plus demunis. Comme l'etait le travail de ma mere. Les valeurs qui l'ont pousse au travail social, a se devouer a ceux qui avaient moins qu'elle (de meme que Papa quand il etait visiteur de prison), sont les meme que nous essayons de transmettre a nos enfants.
Ils sont bien les heritiers de leurs mamie Mali, ces deux petits Anya et Samuel, qui du haut deleur 6 et 3 ans respectivement, obligent Debbie a prendre une valise en plus avec elle au Liberia pour doner leurs affaires aux enfants que connait Saah, le collegue de Debbie qui vit a Monrovia. Ils ont appris que ces enfants manquent de presque tout, comme bien du monde au Liberia.
Anya pose beaucoup de questions et apprend beaucoup. "Au Liberia il y a deux saisons. La saison des pluies et la saison du chaud" dit-elle. "Pour la saison des pluies il faut des bottes." Et voila que ses bottes passent de son placard a la valise de Debbie.
Samuel veut savoir si les enfants du Liberia ont des "stuffed animals" (des peluches). "Pas beaucoup" repond Debbie. Et voila Samuel qui va chercher son leopard et ses autres peluches, et hop - dans la valise, ou il tient aussi a mettre des livres, de habits etc.
Tout cela est tres concret pour lui et Anya. C'est difficile de comprendre si ce n'est qu'un jeu ou une realite pour eux deux. Mais ce qui est sur, c'est qu'il y a tres peu de temps entre la reflection et l'action. Entre ces deux moments, il y a encore a leurs ages tres peu de barrieres. "It's raining. They don't have shoes. I have my boots. Wait. Here are my boots for the Liberia suitcase".
Ce besoin de transformer la reflection sur les inegalites en action reflechie est plus visible chez Anya qui est plus grande.
Par exemple, je raconte a Anya qu'un ami a moi, S., va peut etre perdre son travail, faute de credits dans son ecole a Sarajevo pour continuer a entretenir une classe d'arts plastiques et de peinture (un copain peintre qui enseigne). La lumiere est etieinte et je divague sur les sujets que j'ai en tete pour les endormir. Samuel ronronne deja mais Anya reste attentive. "Is he poor?" demande-t-elle dans l'obscurite. Je reponds: "Not yet but if he looses his jobs and can't find another one, then he could become poor". "Mmmmh... Anya reflechit: "So he is almost-poor" dit-elle. "Why do they want to close his painting class" demande-t-elle. "Because the school has no money for the maintenance of that class" dis-je. Je complemente en disant "The heater is broken and they can't repair it and it is cold in winter, so the students cannot stay in that art class, and all the art material is expensive also and the school can't afford it any longer". Anya a l'air un peu decontenancee, ce qu'elle exprime par un "ah" suivi d'un long silence (tiens, elle dort enfin, me dis-je...). Mais j'ettends la couette qui bouge un peu. Finalement elle parle: "I know. Maybe you can give the school some money and they will repair the heater". Je lui dit que peut etre mais on peut pas donner beaucoup d'argent sur le long terme, ce qui est necessaire au maintien de la classe. La elle me cloue: "But then it's easy. Look. You can work a little more because you always get up late in the morning but if you get up more early then you will work more and then your boss will give you a little more money and then you can send that money to S. and he can give it to his boss at the school and they can buy some colors and brushes and paper and also they can buy a new heater and the children will not be cold in the class and S. will keep his job you see?" Bien sur elle ponctue le tout d'un "You see, it's easy, I told you".
Comme ne pas penser a ma mere en entendant ca?
Tout ca pour dire que rien ne se perd, rien ne se creer, tout se transforme. Et ma petite Anya et mon petit Samuel, ils sont bien parti pour reprendre le flambeau de leur Mamie, chevalier Bayard, championne du travail social s'il il en est, et scoute toujours prete a tout sacrifier pour la defense des moins chanceux, dans ce grand souci de Tzedaka, de la reparation des injustices sociales.
Etait-ce inne en elle, ou a cause de ses experiences d'enfant cachee, de son experience acquise aux E.I. et a Orsay, ou de ses engagements d'adulte, que Mali Herzberg, maman, mamie Mali, n'a jamais fait comme tant d'autre en grandissant, c'est a dire d'etablir ces barrieres entre la reflection et l'action, dont je parlais plus haut? Je suis son fils, et je ne cherche pas de reponse. J'ai simplement la fierte d'avoir ete eleve par une maman dont la generosite, l'emerveillement, le don de soi, etaient restes purs toute sa vie, pour le plus grand bien de ceux qu'elle a eclaire.
mercredi 9 décembre 2009
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3 commentaires:
trois ans? est ce possible? mais Mali est avec chacun chaque jour. Avichag m'a demande la semaine derniere:"tu penses vraiment souvent a Mali? Un peu etonnee j'ai repondu "tout le temps"
J'ai toujours ete loin donc cela ne change pas mais souvent "je vais lui raconter' je vais lui demander' "et le creu devant moi est immense... Mais je sais vraiment qu'elle m'entends ' me reponds et me conseille/ quelques minutes' quelques heures et j'ai la reponse/// merci!
Hier j'ai passe la journee avec ma petite soeur' je l'ai invite a El Gaucho' ce que nos maris respectifs n'apprecient que tres peu et nous avons manger' devore de la viande en rigolant en sachant combien Mali aurais apprecie d'etre avec nous!
Combien elle doit etre apaisee de voir ses petits enfants la faire revivre ici bas!
Je digere encore les steaks. J'avais commence un commentaire mais comme c'etait un peu long j'en ai fait un message.
Merci pour ces témoignages réchauffants.La précision des souvenirs s'estompe souvent mais l'absence se creuse plus profondément.
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